Page Facebook de Abdou Khadre LÔ : LES FRACTURES POLITIQUES


Je ne rentrerai pas dans les considérations juridiques du dossier de la « caisse d’avance » de la mairie de Dakar qui vaut aujourd’hui à l’édile de la capitale de séjourner désormais à la prison de Rebeuss. J’ai mon opinion là-dessus mais le tribunal tranchera.
Sur un plan politique, cette affaire est révélatrice de plusieurs fractures ouvertes qui auront beaucoup de mal à se résorber.

D’ABORD, au sein de la famille socialiste. Après des contusions multiples sur les dernières années, la fracture est désormais tellement énorme que des retrouvailles paraissent impossibles entre les deux courants alignés derrière le Secrétaire Général du Parti (Ousmane Tanor Dieng, fidèle allié du Président Macky Sall) et le maire de Dakar (Khalifa Sall) qui refuse que le PS se range derrière le chef de l’Etat pour les législatives de juillet 2017 et la présidentielle de 2019. Le camp de Khalifa Sall voit la main de Ousmane Tanor Dieng dans l’emprisonnement des lieutenants du maire de Dakar. Ils ont été arrêtés suite à une affaire interne au Parti socialiste. Il ne faut jamais dire jamais en politique mais un rapprochement entre les 2 mastodontes socialistes paraît illusoire aujourd’hui. La rancune sera désormais tenace. 

ENSUITE, fracture plus qu’ouverte entre le camp présidentiel (y comprit la coalition de partis qui le soutiennent) et celui du maire. Le nouvel opposant, Khalifa Sall, a tardé à se jeter ouvertement dans la bataille politique. Pendant des années, il a fait dans le clair-obscur. Depuis quelques temps et surtout après l’emprisonnement de ses proches collaborateurs, il tient un langage plus clair sur ses ambitions. Aujourd’hui, il sera un opposant radical et déclaré au régime. Le tribut est trop lourd pour qu’il ne muscle pas son engagement car vivant un sentiment d’injustice total : être le seul maire à payer pour une pratique administrative en vigueur depuis des décennies (même si cela ne constitue pas un point de droit). 

Maintenant la question est : quelle forme prendra son combat contre le pouvoir ? S’il est condamné pour détournement de deniers publics, il ne pourra plus faire face au Président Sall. Il sera de facto éliminé de la course à la présidentielle de 2019 pour cause d’inéligibilité. Il se voyait en haut de l’affiche, la chute a été brutale et inattendue pour lui. Khalifa Sall n’a, à aucun moment, vu ce coup fatal venir. Comment vivra t-il ce qui se profile comme un rêve brisé ? 

ENFIN, quoi qu’on en dise, cet épisode juridico-politique aggravera la fracture entre les politiques (dans leur ensemble) et les populations qui se bouchaient déjà le nez en observant les agissements souterrains des acteurs. Tous les coups sont donc permis en politique. Ces hommes et femmes sont sans état d’âme lorsqu’il s’agit de défendre des intérêts immédiats et futurs. Le visage plus que hideux de l’arène politique effrayera l’écrasante majorité des citoyens qui n’ont pas envie d’être touchés par le sang qui gicle. Comme souvent, ils se contenteront d’aller voter pour dire leur opinion. 

Ce recul peut être vu comme une aubaine pour les politiciens professionnels qui jubilent à l’idée d’écarter de potentiels engagés sur le terrain politique. En somme, pensent-ils, « restez à votre place. Vous voyez bien que le jeu est trop dangereux et ne vaut pas la peine. ». Pourtant cette distance et ce silence assourdissant ne devraient avoir rien de rassurant. Comme par le passé, les électeurs trouveront toujours un moyen de faire partie du jeu et de façon souvent décisive. Aucune « combinazione » ne peut alors arrêter leur verdict. 

Excellente semaine à tous,
Mercredi 8 Mars 2017




1.Posté par Impertinent le 09/03/2017 02:11
AFFAIRE KHALIFA SALL : Devoir de mémoire et d'introspection !

Les accusations récurrentes des partisans du Maire de Dakar qui voient en son incarcération un complot ourdi et piloté par le secrétaire général de leur parti Ousmane Tanor Dieng me poussent à y jeter mon grain de sel quand bien même les affaires politico-politiciennes du Parti Socialiste sont très loin de mes préoccupations.
À mon avis une petite couche de rappel pour rafraîchir les mémoires s'impose et à ce titre les péripéties de la "farce de congrès" de Juin 2014 ayant reconduit OTD à la tête du parti constituent un événement important.

Sans cesse reporté depuis 2011, le congrès du Parti socialiste sénégalais a fini par se tenir les 6 et 7 juin, avec comme point d’orgue la reconduction d’Ousmane Tanor Dieng au poste de secrétaire général.

Une semaine plus tôt, l’élection qui l’opposait à sa camarade Aissata Tall Sall, députée et maire de Podor, avait été interrompue dans des conditions plus que opaques par Khalifa Sall himself.
Le 29 mai, invoquant un risque pour "l’unité du parti et la cohésion entre ses militants", le maire de Dakar, Khalifa Sall, en sa qualité de président du Comité national de pilotage et d’évaluation (CNPE) des opérations de renouvellement, avait en effet annoncé "l’arrêt de la compétition électorale" entre les deux postulants, écartant de facto la candidature d’Aissata Tall Sall et laissant la voie libre à la réélection de Tanor Dieng.

Tandis que Khalifa Sall affirme qu’Aissata Tall Sall aurait été consentante, voire demandeuse, "la lionne du Fouta" dément formellement avoir sollicité son retrait de la course électorale.

Interrogée sur ce revirement spectaculaire Aissata Tall Sall était catégorique :
"Jeudi 29 mai en début de soirée, un journaliste m’a contactée pour solliciter ma réaction à un communiqué de Khalifa Sall qu’il venait de recevoir, annonçant que l’élection se poursuivrait autour de la seule candidature d’Ousmane Tanor Dieng. Parmi mon équipe, certains préconisaient que je maintienne ma candidature. Mais puisque la décision venait du parti, nous avons décidé de nous y plier."

À la question : "Aviez-vous donné un accord préalable au retrait de votre candidature, comme l’a laissé entendre Khalifa Sall ? Certains affirment même que vous l’auriez sollicité ?", elle dément formellement :

"Je n’ai jamais sollicité ni cautionné le retrait de ma candidature. Je comptais aller au terme de l’élection. C’est Khalifa Sall qui est venu me voir pour me demander de me retirer, avant d’annoncer ensuite cette décision. C’est à lui de s’en expliquer."

Ainsi le Maire de Dakar était le principal artisan du putsch contre Aissata Tall Sall et la reconduction anti-démocratique de l'inamovible et éternel perdant OTD au poste de secrétaire général.
Et si l'arroseur a été arrosé !

Thiey Adouna mo goude tank !



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